Victime collatérale

Publié le par desirsdavenirparis5

 

 

On vient de s’en aperçevoir, sur les décombres encore fumants de la « victoire » en Libye … Cette guerre a fait une victime collatérale, parmi d’autres : l’Europe de la défense. Le président français Nicolas Sarkozy, plus va-t-en-guerre que jamais (il menace désormais l’Iran de frappes préventives, dans le style de l’ex-président George W. Bush !), a prononcé lui-même l’hommage funèbre, à l’ouverture de la 19ème Conférence des ambassadeurs, avant de présider à Paris avec le premier ministre britannique, M. David Cameron, la Conférence internationale de soutien à la Libye nouvelle : « Pour la première fois depuis 1949, s’est-il félicité, l’OTAN s’est mise au service d’une coalition emmenée par deux pays européens déterminés. »

Table des matières

 

 

Les deux « pays déterminés » sont le Royaume Uni et bien sûr la France, dont l’entente est d’autant plus cordiale qu’ils sont pilotés actuellement par deux gouvernements conservateurs : « A eux seuls, fait valoir Nicolas Sarkozy, la France et le Royaume Uni représentent la moitié des budgets et les deux tiers de la recherche de défense. Unis comme jamais depuis le Traité de Lancaster House, nos deux pays sont pratiquement les seuls en Europe à atteindre la norme de 2 % du PIB consacrés à la défense [1]. » Et de brocarder cette Europe menacée de « rétrécissement stratégique » : « Que voit-on ? Une baisse continue des efforts de défense ; l’invocation d’un “soft power” qui sert de paravent au renoncement ; et, trop souvent, l’aveuglement face aux menaces. »

Donc, pour le numéro un français, « les Européens ont démontré pour la première fois qu’ils étaient capables d’intervenir de façon décisive, avec leurs alliés, dans un conflit ouvert à leurs portes — un progrès remarquable par rapport aux guerres de Bosnie et du Kosovo ». Et bienvenu, au moment où la nouvelle vision de l’engagement militaire américain présentée par le président Barack Obama « implique que les Européens assument davantage leurs responsabilités ».

Deuxième étape du raisonnement, le plaidoyer pro domo. « C’est parce que nous avions repris toute notre place dans le commandement intégré de l’OTAN que cela a été possible. » Le président français omet bien sûr de rappeler que cette réintégration au sein de l’Alliance devait être compensée par la création d’un « pilier européen » de défense, autonome par rapport aux Etats-Unis. De cela, il n’est plus trop question. Ou alors, c’est bien d’un pilier au sein de l’OTAN qu’il s’agit. Les rêveurs des états-majors de l’UE, à Bruxelles, qui glosent depuis dix ans sur « l’Europe de la défense », n’ont qu’à se rhabiller...

Autre « victoire » que revendique le numéro un français : le viol du Conseil de sécurité. La résolution 1973 légitimant une opération en Libye avait été arrachée le 17 mars 2011, essentiellement sous la pression de Paris (qui en avait obtenu une autre du même genre sur la Côte d’Ivoire quelques mois plus tôt). « En mobilisant le Conseil de sécurité sur ces deux crises, nous avons concrétisé pour la première fois un principe d’action, que la France avait réussi à faire adopter à l’ONU en 2005 : la responsabilité de protéger. » Et c’est parti pour de nouvelles aventures, avec l’ONU en dispensatrice de bénédictions plus ou moins extorquées ; et l’OTAN comme bras armé d’une « communauté internationale » très occidentalisée...

 

jeudi 1er septembre 2011, par Philippe Leymarie

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Publié dans Afrique

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