Relations tendues entre la France et la Turquie

Publié le par desirsdavenirparis5

G20 | Alors que les relations entre la France et la Turquie sont très tendues, le premier ministre turc, Recep Tayyip Erdogan a fraichement accueilli le président français Nicolas Sarkozy, en visite dans son pays.

Le président français Nicolas Sarkozy a été accueilli vendredi à son arrivée à Ankara par un coup de colère, par voie de presse, du Premier ministre turc, Recep Tayyip Erdogan, déterminé à lui demander des explications sur son refus d’une adhésion de son pays à l’Union européenne.

M. Sarkozy est en visite à Ankara en tant que président du G20, ce que regrettent les hautes autorités turques, qui auraient préféré une visite officielle du président de la République française.

Cette visite n’est "pas à la hauteur de l’amitié franco-turque", avait déclaré M. Erdogan mercredi. "La Turquie et les relations franco-turques méritent bien plus que cela", avait-il protesté.

Autre sujet qui fâche: la candidature turque à l’Union européenne, à laquelle Nicolas Sarkozy et Angela Merkel, chancelière allemande, sont fermement opposés.

"J’ai mis de nombreuses fois en garde M. Sarkozy sur cette question. Nous lui avons dit que son attitude concernant la Turquie est totalement erronée et nous allons l’interroger sur ce point", a déclaré M. Erdogan, lors d’une interview à la télévision turque ATV, jeudi tard dans la soirée.

Selon le Premier ministre turc, "l’Union européenne a besoin de la Turquie, la Turquie a besoin de l’Union européenne".

"Mais si les choses continuent comme ça, alors prenez une décision et annoncez: "nous ne voulons pas de la Turquie" dans l’Europe, a-t-il ajouté, à l’adresse du président français.

Dans une interview au journal turc Posta, publiée vendredi, le président français déclare notamment: "je reste convaincu que la Turquie et l’UE doivent entretenir des relations aussi étroites que possible, sans aller jusqu’à l’intégration, qui ne profiterait en réalité ni à la Turquie, ni à l’Union européenne".

Point mort

Les négociations entre la Turquie et l’Union européenne, qui ont commencé en 2005, sont au point mort, du fait de la question de Chypre et de l’opposition de plusieurs pays européennes à une adhésion turque.

M. Sarkozy considère que la Turquie ne fait, géographiquement, pas partie de l’Europe et estime que ce pays devrait former "un partenariat privilégié" avec l’UE.

Selon l’Elysée, cette visite (la première d’un président français depuis celle de François Mitterrand en 1992) est avant tout "dédiée aux dossiers du G20", le forum des principales économies auquel appartient la Turquie, 17e puissance mondiale.

Comme il l’avait fait auprès du président américain, et avant lui auprès des dirigeants chinois et indien, fin 2010, Nicolas Sarkozy devait exposer les priorités de sa présidence du G20 à MM. Erdogan et au président Abdullah Gül.

Il s’agit de "la réforme du système monétaire international, dont tout le monde reconnaît aujourd’hui la nécessité, de la lutte contre la volatilité excessive du prix des matières premières, énergétiques et agricoles", ainsi que de la "question des financements innovants", a-t-il rappelé au Posta.

La Turquie devrait être attentive à ces chantiers, alors que le Fonds monétaire international, tout en saluant sa croissance vigoureuse, vient de la mettre en garde contre des risques de déséquilibres financiers.

 

AFP | 25.02.2011 | 13:58

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Ankara estime qu'en ces temps de révoltes, son poids mérite plus qu'une visite éclair.

À Istanbul

À peine quelques articles dans la presse signalent la venue de Nicolas Sarkozy en Turquie vendredi. Un micro-trottoir express à Istanbul semble montrer un même désintérêt à la première visite du président de la République française. «Ah? Non je ne savais pas. Et Carla Bruni, est-ce qu'elle vient? Non? Dommage»… Il y a quelques mois encore, le simple fait de décliner sa nationalité française entraînait une cascade de remarques, nourries d'amertume, sur les raisons de l'obstruction du chef de l'État à l'adhésion de la Turquie à l'Union européenne. Aujourd'hui, cette quasi indifférence est révélatrice des nouvelles priorités d'Ankara sur son flanc est, renforcées par l'impasse à l'ouest. Les négociations sont aujourd'hui moribondes: seuls trois chapitres peuvent encore être ouverts, tous les autres sont bloqués par Bruxelles, Chypre ou la France.

L'aller-retour éclair de Nicolas Sarkozy, qui a atterri à 13 heures dans la capitale turque et qui redécolle à 19 heures après s'être entretenu avec son homologue, Abdullah Gül, et le premier ministre, Recep Tayyip Erdogan, a incité ses hôtes à minimiser ce déplacement. Mais le chef du gouvernement n'a pas caché sa déception. «Nous aurions aimé accueillir le président de la République française, mais aujourd'hui, ce n'est pas en tant que président de la République française qu'il vient, mais en tant que président du G20, a-t-il déclaré à l'AFP. La Turquie et les relations franco-turques méritent mieux que cela.» Les Turcs auraient souhaité une visite d'État, avec un passage par Istanbul, pour montrer les attraits de leur pays à leur principal adversaire dans l'UE et surtout, faire oublier à leur opinion publique le sentiment d'être méprisé par la France.

 

«Perception orientaliste»

 

La brève apparition de Nicolas Sarkozy est déplorée par de nombreux analystes qui y voient un signe des défaillances de la politique étrangère française. «La Turquie est devenue un acteur en soi et pour soi, souligne Cengiz Aktar, spécialiste des affaires européennes. L'Élysée a encore une perception orientaliste et a du mal à traiter d'égal à égal avec elle.» Les révoltes qui agitent le monde arabe ont relégué à l'arrière-plan le blocage des négociations. «Ankara se concentre sur le Moyen-Orient car elle sait, si la transition est bien menée, qu'elle peut-être la grande gagnante, décrypte Mehmet Ali Birand, éditeur en chef de CNN-Turk et proeuropéen. C'est triste à dire, mais la Turquie s'est lassée et n'attend plus rien de Nicolas Sarkozy ou de l'Europe.»

L'évolution de la situation sur les rives de la Méditerranée constituera un sujet de discussion prioritaire. «Nous allons dire au président français qu'il doit avoir une approche positive sur l'adhésion de notre pays, spécialement en ces temps de crise au Moyen-Orient, explique Murat Mercan, président de la commission des affaires étrangères au Parlement. J'espère que la situation actuelle va l'aider à avoir une meilleure opinion. Nous avons de nombreux atouts, complémentaires de ceux de l'UE, qui peuvent nous aider à démocratiser ensemble la région.» Cette volonté affichée de coopération ne se traduit pas pour l'instant sur le terrain: les islamo-conservateurs ont observé que l'institution européenne est inaudible au Moyen-Orient et ils avancent leurs pions en solitaire.

Une première divergence est apparue. Bruxelles et les États-Unis envisagent des sanctions contre le colonel Kadhafi. Erdogan a déclaré qu'il y était opposé. La Turquie a des intérêts économiques très importants en Libye. Plus de 200 constructeurs turcs et 20.000 de ses ressortissants (5000 ont déjà été rapatriés) y sont présents.

  Laure Marchand 25/02/201

 

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