Réforme des retraites, les questions qu'elle suscite et les raisons de s'y opposer.

Publié le par desirsdavenirparis5

Vous trouverez ci-dessous une tribune de Ségolène Royal publiée par Libération aujourd'hui concernant le projet du gouvernement sur la réforme des retraites, les questions qu'il suscite et les raisons de s'y opposer.

 

 

 

Amicalement,

 

 

 

 

L'équipe de Ségolène Royal


 


 

Retraites: Il faut se battre pour un référendum



Depuis plusieurs mois, le gouvernement explique aux Français qu’il est important et urgent de remettre en cause le système de retraites, particulièrement la liberté de partir à la retraite à 60 ans pour les carrières complètes et à 65 ans pour ceux qui n’ont pas tous leurs trimestres de cotisations.

Un sujet aussi essentiel pour la vie des Français mérite une clarification pour dissiper le brouillard des contre-vérités gouvernementales et poser les véritables enjeux de cette réforme .

Voici donc 10 réponses aux questions que les Français se posent.

 

 

 

 



1) Pourquoi faut-il se battre pour un référendum?

 

La retraite est le patrimoine commun de tous les Français. Ce serait un vrai progrès démocratique qu'ils puissent se prononcer sur un enjeu de société aussi important. La réforme des retraites ne doit pas se faire contre le peuple mais avec lui.

 


2) Y a-t-il un problème d’équilibre financier des régimes de retraites ?

 

Oui. Grâce à l’allongement de l’espérance de vie et à l’arrivée à l’âge de la retraite des baby-boomer, le nombre de retraités, d’un peu plus de 15 millions en 2010, passera à 23 millions en 2050 alors que le nombre de cotisants connaîtra sur la même période une quasi-stagnation. D’autres facteurs jouent un rôle dans le déséquilibre du financement des retraites : le sous-emploi des jeunes et des seniors, la diminution de la part des salaires (et donc de l’assiette des cotisations retraites) dans la richesse nationale au profit du capital, et la faiblesse de la croissance économique.

 

Ce constat et la nécessité qui l’accompagne d’une réforme du financement des régimes de retraites, ne sont niés par personne et certainement pas, comme le gouvernement voudrait le faire croire, par la gauche et les organisations syndicales. Ce qui est contesté c’est la brutalité de la réforme, sa profonde injustice, l’affirmation qu’une seule réforme est possible, son urgence décrétée pour satisfaire les agences de notation et les amis financiers du pouvoir et prétendre ainsi avoir fait preuve de courage.

 


3) Pourquoi la réforme du gouvernement est injuste ?

 

Parce qu’elle pèse quasi-exclusivement sur les salariés. Reporter pour ceux qui ont le nombre de trimestres requis l'âge d’ouverture des droits à la retraite de 60 à 62 ans et reporter à 67 ans l'âge auquel on peut prétendre à une retraite à taux plein (c'est-à-dire sans pénalités si on n'a pas tous ses trimestres de cotisations), c'est taxer les salariés, en obligeant à travailler et à cotiser encore ceux qui ont déjà le nombre d’annuités nécessaires, et préserver les revenus du capital qui doivent pourtant leur existence et leur accroissement au travail des salariés. Il s’agit donc d’une taxe sur le travail créée par ceux qui prétendaient défendre la valeur travail.

 

La deuxième grande injustice est celle infligée aux femmes.Elles subissent déjà, durant leur carrière professionnelle, une inégalité salariale totalement inacceptable et qui se perpétue dans les niveaux de pension de retraites (38% d'écart entre les retraites des femmes et celles des hommes). Le report à 67 ans de l'âge pour obtenir la retraite à taux plein va aggraver leur situation puisqu'elles ont des carrières incomplètes qui rend difficile l'obtention du nombre suffisant de trimestres de cotisations .Je rappelle que Nicolas Sarkozy, pendant sa campagne , avait promis l’égalité salariale hommes-femmes à l’horizon 2010.

 


4 ) Cette réforme est-elle efficace ?

 

Non. Elle est non seulement injuste mais elle est inefficace.

Comme l'a souligné à plusieurs reprises la présidente de la caisse nationale d'assurance vieillesse, la question du financement n’est pas réglée : dès 2013-2014, il manquera 4 milliards d'euros pour équilibrer le système.

 


5) Cette réforme améliorera t-elle l’emploi des jeunes et des séniors ?

 

Non . Le chomage des jeunes (près d'un quart d'entre eux à la recherche d'un emploi) et des seniors (+ 30% de chômeurs âgés en deux ans) va être aggravé par la réforme . Qui nous fera croire que des entreprise qui trouvent aujourd'hui leurs salariés trop âgés à partir de 55 ans vont les garder demain jusqu'à 62 ans ?

 

 


6) La question de la pénibilité est-elle prise en compte par cette réforme ?

 

Non. Le gouvernement confond volontairement incapacité (c'est-à-dire invalidité), et pénibilité des tâches. Alors que l'ordre juste voudrait qu'on reconnaisse que des métiers sont pénibles parce que des salariés sont exposés à des produits dangereux, au travail de nuit ou à des horaires décalés et à des travaux de force, le gouvernement se contente d'octroyer une retraité anticipée aux travailleurs touchés par une incapacité de travail reconnue avant le départ en retraite. Or, tous les médecins du travail savent que de nombreuses maladies (le cancer de la plèvre lié à l'exposition à l'amiante, le cancer du larynx dû à l'exposition à des produits phyto-sanitaires dangereux, par exemple) se déclarent longtemps après la fin de l'exposition au risque, donc après la cessation d’activité professionnelle.

 


7) La France fait elle comme ses voisins européens ?

 

Non. La plupart des pays européens ont utilisé des mesures d'âge pour revenir à l'équilibre financier. Mais ils ont soit reculé l'âge légal de départ à la retraite, soit allongé la durée de cotisations. Le gouvernement français, lui a choisi d'utiliser les deux leviers : si la réforme est adoptée nous aurons le système le plus dur d'Europe, le moins négocié avec les partenaires sociaux et le plus brutal dans la rapidité de sa mise en oeuvre.

 

 


8) Qui va profiter de la réforme ?

 

Certainement pas les salariés qui vont être lourdement taxés. Tout le monde a pu constater que le MEDEF est étrangement silencieux dans cette affaire : tout simplement parce que cette réforme est sa réforme. Derrière cette réforme, se cachent les banques, les fonds de pension, les assurances, tous les financiers proches ou membres du premier cercle du pouvoir qui voient déjà le pactole que représentent les futurs retraités inquiets pour leur avenir et tentés de se tourner vers les complémentaires retraites privées. Il va sans dire que les salariés les plus modestes devront se contenter de leur régime de base.

 


9) Une autre réforme est-elle possible ?

 

Oui Je refuse cette fatalité qui voudrait que les femmes, les ouvriers, les employés, les travailleurs qui ont commencé à travailler tôt, soient si durement frappés. C'est pourquoi les socialistes, j'en prends de nouveau l'engagement, rétabliront la liberté de partir à la retraite à 60 ans et à 65 ans pour ceux qui le souhaitent. Les efforts doivent être partagés et nous acceptons donc le principe d'un allongement de la durée de cotisations jusqu'à 41,5 années. Mais la contre-partie, c'est la mise à contribution des revenus tirés du capital . La seule niche dite Copé qui exonère d'impôt sur les plus-values les sociétés (souvent du CAC 40) qui vendent leurs filiales a coûté en trois ans 22 milliards d'euros à l'Etat pour le seul bénéfice des actionnaires.

La réforme du gouvernement néglige aussi le volontarisme dans l’action politique : notre pays a une situation démographique plus favorable que celles des autres pays européens et nous pouvons encore la conforter.


 

10 )La réforme du gouvernement est-elle une fatalité ?

 

Non. La mobilisation sociale doit continuer et s'amplifie, et le combat parlementaire se poursuivre

Ce temps de la contestation sociale est aussi le temps de la pédagogie. L'opposition qui est appelée à nouveau à gouverner doit donner un débouché politique à cette contestation en même temps qu'une espérance, et expliquer aux Français pourquoi nous rétablirons, en 2012, la liberté de partir à la retraite à 60 ans. Ce n’est pas une utopie. C’est cette alliance de la justice et du réalisme économique qui guidera notre action. Nous sommes déterminés.



Ségolène Royal



 

 

Publié dans Retraites-travail

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