Quand « la main » de Thierry Henry chatouille les valeurs de l’identité nationale…

Publié le par desirsdavenirparis5

Un article de Laurent Loiseau, militant PS/DA du 5ème arrondissement
loiseau.laurent@gmail.com

Quand « la main » de Thierry Henry chatouille les valeurs de l’identité nationale…

 

Et si les politiques saisissaient « la main » de Thierry Henry ?

 

Après tout, les intellectuels sont entrés sans tarder dans la polémique sportivo-médiatique. « Nous sommes tous des Irlandais ! » avait d’abord clamé Jacques Attali, scrutateur avisé de notre société éparpillée, dans son billet publié sur Slate.fr. Alain Finkielkraut dit aussi son désarroi sur l’issue de cette piteuse phase finale du mondial de handball…pardon, de football. Pourtant, notre grand penseur de l’identité nationale ne s’est-il pas mis « hors jeu » en s’inscrivant pas l’incident au point de pénalty, dans la surface de réparation du débat identitaire ? En effet, il faut considérer, pourvu que l’on dépasse le simple constat réaliste du « fait de jeu » ou le cynisme mercantile, que cette erreur d’arbitrage interroge le fondement même de société française.

 

Expliquons-nous. Toutes choses égales par ailleurs, le football participe de ces grandes confrontations de l’histoire. Par l’ampleur des enjeux, l’effet d’identification et la surmédiatisation, nos contingents en short défendent donc un peu de notre civilisation. En cela, les joueurs sont à la fois les ambassadeurs de notre pays, dont ils véhiculent les valeurs et qu’ils enrichissent en fonction de leur exploit individuel ou leur capacité à les incarner collectivement.

Les onze de Platini et Hidalgo, les black-blanc-bleurs de Lemaire ou les bleus de Domench, laisseront, sur ses champs de bataille apaisés leur empreinte dans notre mémoire partagée.

 

Avec un rien de toupet et une outrance confinant à la vulgarité, on compara nos commentateurs sportifs avec des grands conteurs du roman national, que furent un Victor Hugo incarnant les exploits de Cambronne (et son fameux « merde ! » lancé à la face des Anglais) ou d’un Voltaire contant les exploits du « Vert Galant », dans sa Henriade réconciliatrice. Notre épopée sportive n’est-elle aujourd’hui partie intégrante de notre roman national ? Nos soldats armés de crampons ne se battent-ils pas pour élargir notre ligne bleu horizon. Précisément. Et la figure du héros, en France, est le vecteur privilégié pour unifier la Nation. De Gaulle et Thuram ne sont-ils pas des hommes providentiels ? Riberi le musulman unifiant les lignes d’attaque des Bleux ne produit-il pas les même effets sur la société qu’un Henri IV parpaillot, unifiant la France catholique et protestantes ? 

 

De ces anachronismes, on retient que la France éternelle est celle qui considère l’honneur et la fraternité comme une valeur suprême de notre pays. Voilà de quoi alimenter le débat sur l’identité nationale. Voilà qui nous explique aussi pourquoi la France a toujours pardonné à ses losers magnifiques : Poulidor fut adulé même s’il n’a jamais remporté le tour de France. François Ier  admiré, même s’il a connu le déshonneur de la prison italienne.

 

Gougueulez donc Thierry Henry et pleurez : sur la blogosphère, ce ne sont qu’invectives et lazzis. Sur Youtube, on oppose son geste petit bras à la grandeur d’âme d’un Rossi, l’attaquant romain qui, de lui même, a refusé le but qu’il avait inscrit de la main et que l’arbitre avait néanmoins validé. Deux heures après le match, Titi-l’ange déchu s’était transformé en gros minet roublard et un chat noir était taggué sur sa page Facebook. Mais il ne sert à rien de blâmer le joueur si l’on ne pointe pas le climat moral délétère que enveloppe la France depuis une dizaine d’année, et l’absence de grandeur morale du coach Raymond  Doménech, tantôt hypocrite, tantôt faussement idiot, selon l’humeur du personnage autiste ou cynique qu’il semble incarner.

 

Le geste de Thierry Henru – ou plutôt son absence de geste après l’action, mensonge par omission  – est-il un signe des temps, où le pousse-toi-la-que-je-m'y-mette tient lieu de parole d'évangile ? Un Yannick Noah en son temps, avait su transmettre des valeurs identitaires qui aujourd’hui encensent indéfectiblement l’image de la personnalité préférée des Français. Avant lui, les grandes figures de l’Histoire avaient su entraîner derrière leurs camaïeux de panaches, d’étendards et d’étoffes une France debout, qui ne mesure pas les valeurs sur la balance d’un résultat mais les inscrivent dans les livres au nom d’une éthique intemporelle. Cette France de l’honneur, qui réunit Henri IV, Lazare Carnot, de Gaulle et Jaurès surmonte la défaite pourvu qu’elle soit porteuse d’espoir et de sens.  Et toute une nation, dans son acception la plus populaire leur en est reconnaissante. Et se sont ces valeurs qui permet l’hymne d’incarner pleinement l’identité nationale. Le chant guerrier devient alors chant d’espoir, symbolisant notre devise et au-delà, une fierté de compatriotes qui rappellent la fraternité des tranchées. Et ce sont ces mêmes valeurs qui permettent, ensuite à chaque individu, de construire son identité, et de la porter haut, quelle que soit son origine.

 

La France doit retrouver ces valeurs, si elle veut qu’un jour, tous les Thierry Henry puissent avoir intégré dans leur ADN, le réflexe instantané de préférer la gloire à la gloriole.

 

Laurent Loiseau

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 



Publié dans Morale-Moeurs-Loi

Pour être informé des derniers articles, inscrivez vous :
Commenter cet article