Pour un grand rassemblement contre l’excès de pouvoir

Publié le par desirsdavenirparis5


Donc Nicolas Sarkozy (qui intervient pratiquement chaque jour à la télévision), mobilisera lundi, une fois de plus, TF1 pendant toute la soirée, sans limites, sans contrepoids ni contradicteur. Il ne sera confronté qu’à ses reflets.

Il répondra autant qu’il voudra aux « questions des Français » comme le font régulièrement Vladimir Poutine en Russie et Hugo Chavez au Venezuela.
Et ça passe comme une lettre à la poste. Même les oppositions politiques, syndicales et médiatiques, ne réagissent quasiment plus. On se fait à tout.
Or, réfléchissons-y un instant : le Conseil Constitutionnel, bien que de droite, ose donner un signe d’indépendance, il est aussitôt stigmatisé, dénoncé et on envisage d’en modifier la composition, le fonctionnement et le rôle. Aux Etats-Unis, reprocher à la Cour Suprême de ne pas être aux ordres, ce serait inconcevable !
Les régions constituent un ultime contrepouvoir ? On concocte donc un nouveau mode de scrutin majoritaire à un tour qui permettrait à l’UMP de contrôler presque tous les Conseils régionaux, même avec 30 % des suffrages contre 60 % pour l’opposition.
Les juges d’instruction représentent un pôle de résistance ? On supprimera les juges, on fera dépendre l’instruction du Parquet, lui-même dépendant du pouvoir politique, et on nomme des amis du président à tous les niveaux de la justice et de la police.
La télévision publique est moins soumise que la télévision privée tenue par des amis intimes du chef de l’Etat ? Nicolas Sarkozy nommera lui-même à la tête des chaînes, et licenciera si besoin, des présidents qui lui devront tout et ne pourront donc rien lui refuser.
France Inter cherche à garder une certaine distance à l’égard du pouvoir ? On explique à l’Elysée, et on fait dire, qu’il va lui falloir changer de ton.
Aucun amendement parlementaire, même voté en première lecture, même défendu par la droite, mais non dûment estampillé par l’Elysée n’est accepté. Jamais. Toutes les demandes de référendum, même concernant la réforme territoriale, référendum qui pourtant s’imposerait, sont rejetées. Et, on refuse toute idée de commission d’enquête sur le scandale des sondages concoctés, payés et distribués par l’Elysée. Les décisions sont prises au sommet, par un seul homme, sans concertation ou débat préalable, ce qui débouche sur des couacs en série. Partout le pouvoir ultra personnel génère une ultra mal gouvernance.
Conclusion : il ne s’agit pas, encore une fois, de lancer un appel à la démission de Nicolas Sarkozy, comme certains internautes l’ont proposé. Il est légitime. Il a été élu démocratiquement. Il dispose d’une majorité parlementaire. Quand il applique son programme, même si on y est hostile, on ne peut pas le lui reprocher. Il n’a ni comploté avec la mafia sicilienne, ni fait livrer à l’Elysée des cargaisons de filles tarifées comme Berlusconi.
Mais pourquoi, en revanche, comme en Italie, les internautes ne se substitueraient-ils pas à des oppositions impuissantes pour appeler, au-delà des clivages partisans (car un gaulliste ou un libéral ne devrait pas être moins choqué qu’un socialiste), à un vaste rassemblement, sans drapeau ni sigle, pour la défense des principes républicains et démocratiques chaque jour un peu plus bafoués. L’affaire Proglio montre ce qu’une mobilisation spontanée peu obtenir.
Je mets la proposition en discussion. Faites passer le message.
Sondages élyséens : c’est indicible
Les sondages concoctés, commandés, payés et distribués par l’Elysée ? Pas touche. La majorité UMP a refusé qu’une commission d’enquêtes se penche sur cette question. Ce qui prouve, de façon désormais indubitable, qu’il y a réellement des réalités inavouables qui doivent absolument rester cachées.
En fait, les parlementaires sarkozystes ont fait pire : ils ont accepté une commission d’enquête à condition qu’il lui soit interdit d’enquêter sur l’Elysée. En revanche, elle aura le droit de s’inquiéter de la façon dont sont utilisés et payés les sondages par la ville de Cergy Pontoise ou le département du Pas-de-Calais. De plus en plus fort.
Mais, qu’est-ce que Dieu a contre Haïti ?
A propos des réactions suscitées par mon titre « Le Christ s’est arrêté avant Haïti » :
La tragédie de Haïti n’interdit évidemment pas de croire en Dieu, mais elle interpelle, en revanche, tous ceux qui professent, en quelque langue que ce soit, ce fatalisme délétère que résume la terrible expression « Inch’Allah ! » : « Dieu l’a voulu ! ».
Dieu a-t-il voulu, par on ne sait quel acharnement, que tous les maux possibles et imaginables, tous, sans exception, systématiquement et depuis cinq siècles, que la terre, le ciel ou les hommes en soient responsables, s’abattent rageusement, sauvagement sur l’île martyre de Haïti, l’une des nations du monde où l’on croit le plus en lui, où on le prie avec le plus d’ardeur ?
Voltaire s’était déjà posé la question, en 1755, après le tremblement de terre qui ravagea Lisbonne et fit 20 000 victimes. Ce n’est pas Dieu créateur, c’est-à-dire démiurge, qui pose problème, c’est le Dieu planificateur et organisateur qui prévoit et réalise. Rendre Dieu responsable de ces injustices inouïes, telle la Shoah qui frappa un peuple déjà, depuis 2600 ans, martyrisé, ou ce tremblement de terre qui donne le coup de grâce à une île, Haïti, qui n’a échappé à aucune des catastrophes universelles, est absurde et dérisoire pour un non-croyant et insupportable pour un croyant. Le seul Dieu possible, au fond, c’est-à-dire le seul Dieu innocent de l’horreur haïtienne, est celui de Spinoza : ce Dieu qui résume en lui-même tout l’équilibre de la nature et qui ne saurait, par conséquent, être à l’origine des atteintes à cet équilibre. Un Dieu qui ne veut rien, irresponsable, et qui n’aurait, au fond, que déclenché le processus qui nous permet, pour échapper au désespoir, de tout attendre de notre propre volonté. Je n’y crois pas, mais je l’accepte.
Dieu a voulu quoi ? L’éradication de la population indienne, l’esclavage de masse, l’invasion coloniale, les guerres civiles impitoyables et réitérées, les coups d’Etat en série, les dictatures ubuesques, la misère, les cyclones, les ouragans, le tremblement de terre ? Et tout cela s’abattant sur l’une des populations des plus chaleureuses, des plus généreuses, des plus créatives et avant-gardistes qui se puisse concevoir.
Victime de toutes les dérives de notre culture, Haïti méritait-elle de subir également toutes les foudres de la nature ? Peut-être Dieu n’en a-t-il pas été informé.
Vendredi 22 Janvier 2010 Jean François Kahn
"Tourner la page" LE BLOG DE JEAN-FRANCOIS KAHN paru dans Marianne 2 .fr

Publié dans Sarkozy & scandales

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