Anticor: "Comment l'Elysée a-t-il utilisé les sondages?"

Publié le par desirsdavenirparis5

Un juge d'instruction, Serge Tournaire, a été désigné pour enquêter sur les sondages commandés par l'Elysée à Patrick Buisson et son cabinet Publifact. L'affaire avait été révélée par un rapport de la Cour des comptes, en 2009. Une plainte d'Anticor avait été classée sans suite, le parquet estimant que l'immunité présidentielle s'appliquait à ses collaborateurs. La nouvelle procédure est une nouvelle fois initiée par l'association Anti-corruption. Son avocat, Me Jérôme Karsenti, interrogé par leJDD.fr, espère surmonter les réticences du parquet.


Le parquet n'a pas changé d'attitude, souhaitant un non-lieu. Ne craignez-vous pas de vous heurter une nouvelle fois à l'extension de l'immunité?
L'avantage, c'est qu'on a une cohérence du parquet. On sait aujourd'hui, compte tenu des stratégies dans tous les dossiers politiques, que le parquet n'est rien d'autre que la voix du politique. C'est là l'avantage d'une information judiciaire: l'enquête échappe au parquet. On a un juge indépendant et impartial qui va pouvoir enquêter. Bien sûr le parquet va résister, par des appels. Mais à chaque fois, des magistrats indépendants et impartiaux trancheront les questions posées. La question de l'extension de l'immunité présidentielle aux services ou aux collaborateurs de l'Elysée est une vue de l'esprit. Tous les constitutionnalistes qui se sont penchés sur ce sujet disent la même chose: l'immunité présidentielle est personnelle. Elle ne peut pas être étendue à qui que ce soit.

Même si, selon l'argument du parquet <http://www.lejdd.fr/Politique/Actualite/L-extension-aux-collaborateurs-de-l-irresponsabilite-penale-du-chef-de-l-Etat-fait-polemique-231758/> , délégation de signature ne veut pas dire qu'Emmanuelle Mignon, en l'occurrence (directrice de cabinet à l'époque, ndlr), avait un pouvoir en propre?
Elle est directrice de cabinet. Si elle estime qu'elle est en train de faire quelque chose d'illégal, elle a le devoir de ne pas le faire. Par son acte, elle participe à l'illégalité. Son intentionnalité peut être poursuivie.

«La question de l'extension de l'immunité présidentielle est une vue de l'esprit»
Le parquet est la "voix du politique", dites-vous. L'extension serait totalement infondée d'un point de vue juridique?
Oui. D'ailleurs, l'argumentation du parquet est intéressante. Plutôt que de montrer pourquoi il n'y aurait pas d'infraction –ce serait dur quand la Cour des comptes explique pourquoi il y a infraction-, il se retranche derrière la question de l'immunité présidentielle, qui deviendrait le bouclier absolu à toutes les infractions.

L'Elysée a fait le ménage dans ses sondages. Pourquoi faut-il continuer la procédure judiciaire?
J'en ai un peu marre. Lorsque finalement le politique qui commet des choses illégales répare, il n'y a plus d'infraction. Dans tout autre type de situation, le délinquant qui vole une mobylette et qui la restitue est poursuivi pour vol de mobylette. La réparation ne tue pas l'infraction. L'Etat de droit, ce n'est pas ça.

Que demandez-vous?
On demande à ce que les juges puissent analyser la manière dont cette convention a été passée, ses motifs, ce qui a été dépensé, comment ont été payés les sondages, par qui. Derrière ça, la question qui va être posée, mais qui n'est pas juridique, c'est: comment l'Elysée a utilisé les sondages et pourquoi faire?

  <http://www.lejdd.fr/Societe/Justice/Actualite/Interview-Anticor-s-oppose-a-l-extension-de-l-immunite-presidentielle-273199/>

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