Martine Aubry fait le dos rond

Publié le par desirsdavenirparis5

Martine Aubry n’en démord pas. Après le plongeon du 7 juin, il n’est pas question de faire des annonces tonitruantes et de sonner le tocsin de la rue de Solferino. Lors de la réunion du bureau national, mardi 16 juin, la première secrétaire s’est de nouveau inscrite dans le tempo défini par son discours prononcé une semaine auparavant face au conseil national. Autrement-dit, elle compte se hâter lentement. Mme Aubry a annoncé son intention d’adresser une lettre à tous les adhérents et rendu public un calendrier qui fixe les étapes de la « refondation ». Au programme : un « séminaire de la direction » aura lieu 7 juillet, qui donnera un avant-goût du projet, suivi par un bureau national exceptionnel. L’université d’été de La Rochelle sera studieuse (si, si…) et devrait accueillir des représentants d’autres partis de gauche. A plus longue échéance, sont prévus une convention sur l’économie en janvier 2010 (présidée par Pierre Moscovici) et, en juin 2010, une convention de la rénovation (présidée par Arnaud Montebourg).

Lors de cette dernière convention, « il sera question des primaires ouvertes », dixit l’état-major socialiste. Cette position est éminemment ambiguë. A la direction du PS, on explique que l’affaire est compliquée – « c’est bien le moins », dirait François Hollande – et exige d’être débattue avec les partenaires de la « gauche gouvernementale ». D’où la nécessité de prendre du temps pour en discuter avec eux. Ce à quoi les partisans des primaires répondent que c’est précisément parce que la question est complexe qu’il faut prendre une décision le plus tôt possible. Fin 2009, par exemple. Cette décision ne doit pas porter sur le schéma mais sur le principe politique consistant à faire désigner le futur candidat à la présidentielle par les sympathisants de gauche. Dans quelques jours, la sortie du rapport Montebourg et les réactions qui suivront permettront de savoir si la direction cherche à noyer le poisson ou si elle est réellement ouverte à une telle proposition.

Par ailleurs, l’idée évoquée par Martine Aubry de constituer une super-direction resserrée d’une quinzaine de membres n’a toujours pas débouché. A la suite de contacts finalement infructueux, les amis de Vincent Peillon ont renoncé à y participer. Quant au projet de constitution de ce qui aurait pu ressembler à un comité des sages, il apparaît mort-né. On apprend incidemment que cette intention qui figurait dans le discours écrit de Martine Aubry devant le conseil national remis à la presse – et qui avait été développée devant les journalistes par l’entourage de la première secrétaire – aurait finalement été zappée par la première secrétaire au moment de s’exprimer. Compte tenu du caractère ô combien novateur de cette proposition – et du peu d’empressement des personnalités pressenties pour y participer – on peut considérer que Mme Aubry n’a pas eu tout à fait tort. Evidemment, si le CN ne s’était pas tenu à huis-clos – fait rarissime – les médias auraient rectifié l’erreur…

Cette façon de faire le gros dos après le coup de bambou du 7 juin laisse tout de même planer un sentiment bizarre. Comme si, finalement, les élections européennes ne constituaient, pour reprendre l’expression d’un secrétaire national, qu’un « scrutin-artefact »… Rue de Solferino, le nouveau mot-d’ordre est : « il faut enclencher une dynamique sur le projet ». Sauf que celui-ci est encore dans les limbes. Et que – mais on se trompe peut-être – sans électrochoc ni message fort, on voit mal le grand corps malade du PS se requinquer par la seule force des idées qui jailliront de son laboratoire.

Dans l’entourage de la première secrétaire, on  estime qu’une expression trop radicale serait de toute manière plombée par le manque de crédibilité actuel du PS. Et que le spectacle donné par les quadras ne plaide pas vraiment pour la mise en exergue des primaires comme un symbole de rénovation des comportements. « Nous ne tomberons pas dans le piège que vous » - les médias - « nous tendez en réagissant aux européennes de façon artificielle » prévient Claude Bartolone. « Nous allons poursuivre le travail de fond afin de porter un nouveau projet de société aux régionales de mars 2010 » assure-t-il. C’est donc cela ; place aux régionales, la page des européennes est déjà tournée.

Jean-Michel Normand
 17 juin 2009
( Blog du Monde)
 

Publié dans DA-PS

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